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samedi 31 mars 2012

A quand le "Printemps" Congolais ?

L'année 2011 a vu le monde arabe s'éveiller comme par enchantement, et réclamer la liberté, la démocratie, et la dignité à ses dirigeants, dont on pensait qu'ils étaient intouchables et tout puissants.

La Tunisie de Ben Ali, l'Egypte de Moubarak, puis - avec une main étrangère - la Libye du Guide, ont tour à tour connu leurs "révolutions". Aujourd'hui encore, les syriens sont en pleine lutte, et si je ne peux pas parier sur la date où viendra leur victoire, je suis par contre convaincu qu'elle arrivera tout de même.

Nombreux sont les Congolais qui ont pleuré la mort tragique de Kadhaffi, arguant que "lui au moins avait construit organisé son pays", que les libyens "eux au moins mangeaient à leur faim", etc. Un peu comme des esclaves qui se disent: la liberté ça peut attendre, pourvu qu'on mange, qu'on étudie et qu'on vive convenablement (matériellement j'entends).

Avec les dernières élections, dont tout le monde sait - sauf mauvaise foi ou moquerie - qu'elles ont été un fiasco, j'ai pensé que le tour de la RDC de connaître son "Printemps" de révolution était arrivé. Je ne suis pas adepte du chaos, loin de là. Je ne suis même pas de quelque obédience politique que ce soit (parce que la politique congolaise me dégoûte). Non. Ce que j'espérais, c'était que les citoyens congolais allaient enfin pouvoir se mobiliser et exiger que les élections se passent dans les normes et que leur volonté soit respecté par tous. J'espérais qu'on allait enfin s'affranchir de la peur, et oser dire dans les rues, dans les villes et les villages, que nous avons nous aussi droit à la liberté, à la démocratie, au respect de nos choix quels qu'ils soient.

Hélas ! j'ai vu des hommes, des femmes et des jeunes peureux, résignés, fatalistes. J'ai entendu autour de moi, à la radio et sur les médias sociaux des mots pathétiques de déception passive, d'abandon, de capitulation. Des messages du genre: "pour nous voter c'est qu'une formalité, que veux-tu?"; ou "Nous n'y pouvons rien, si nous allons dans la rue ils vont nous tuer ou nous jeter en prison", ou "Ce n'est pas nous qui allons changer ce pays, tout ira bien lorsque Dieu voudra", ou encore "Au lieu de mourir aujourd'hui, je mourrai demain: la politique ce n'est pas mon affaire", etc.

Oh ! vous ne pouvez pas imaginer mon désarroi.
La RDC a assez d'intellectuels, assez de jeunes (plus de 60% de la population auraient moins de 30 ans),... Mais tout cela n'est rien tant que le pays n'aura pas des citoyennes et des citoyens qui comprennent que le destin de la nation et dans leurs mains - chacun individuellement et tous collectivement -, et qu'ils ont l'obligation d'agir pour changer les choses; tant que tout le monde regardera juste son petit ventre, sa petite besace, sa petite famille ou son petit clan et se dira: périsse la nation pourvu que je survive"; tant qu'on ne s'affranchira pas de la peur, du fatalisme, de la crédulité.

La liberté n'est pas un cadeau, la démocratie et le progrès encore moins. Il faut lutter; il faut les mériter. Et ni ces dirigeants sans scrupule, insouciants et cupides, ni les occidentaux ne nous les apporteront tout frais. Le Congolais doit se mettre cela en tête. Sinon, on attendra indéfiniment le soleil du printemps: l'hiver de l'humiliation et de la dépendance perdurera...

Jean-Mobert N.

jeudi 29 mars 2012

Bosco NTAGANDA "personna non grata" au Nord-Kivu?


LUBANGA jugé, à quand le tour de Bosco NTAGANDA ?   

Le Nord-Kivu réclame la fin de l’impunité !
DÉCLARATION DES ORGANISATIONS DE LA SOCIÉTÉ CIVILE DU NORD-KIVU

Goma, le 21 mars 2012


Nous, organisations de la société civile du Nord-Kivu signataires de la présente, prenons acte du verdict de la Cour pénale internationale du 14 mars 2012, reconnaissant la culpabilité de Monsieur Thomas LUBANGA pour crimes de guerre, et nous en félicitons.
Ce verdict, le tout premier rendu par Cour pénale internationale marque, en dépit de imperfections évidentes mises en lumière par le procès, un signal fort à l’endroit de tous ceux qui, en Ituri, au Nord-Kivu, n’importe où partout en RDC et ailleurs, ont commis ou continuent de commettre des crimes internationaux, sous le regard impuissant ou indifférent de la justice nationale.
Ce verdict constitue aussi pour les milliers de victimes congolaises – et celles de l’Est tout particulièrement – un début de soulagement et une raison d’espérer que plus jamais personne, quel que soit son rang, sa réputation, ou la durée de sa cavale, ne sera à l’abri de la justice.
Cependant, ce développement encourageant est gravement contrarié par l’impunité et la protection dont continue de jouir Monsieur Bosco NTAGANDA, chef d’Etat-major de Thomas LUBANGA au sein de la branche armée de l’Union des Patriotes Congolais, à l’époque de la commission des crimes pour lesquels Thomas LUBANGA a été jugé, et dont il est coauteur.
Monsieur Bosco NTAGANDA fait l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI depuis 2006, mais les autorités congolaises s’obstinent à refuser de l’arrêter et de le transférer, faute de pouvoir le juger, prétextant des raisons d’ordre politique tout à fait éhontées. NTAGANDA a été promu Général au sein des FARDC et occupe actuellement le poste de Commandant Adjoint des opérations dans l’Est de la RDC. Pendant ce temps, le Général et ses réseaux d’intouchables ont continué de commettre ou de commanditer d’autres crimes graves au Nord-Kivu, au sein de la sinistre rébellion du CNDP comme au sein des FARDC, et leur implication dans le pillages, l’exploitation et le commerce illicite des ressources minières de la province ne fait aucun doute.
Cette situation est une honte pour notre armée et pour notre pays qui du reste est Partie au Statut de Rome, et un affront pour les innombrables victimes de ses exactions, et une source permanente d’inquiétude et de peur pour toute la population de l’Est de la RDC et du Nord-Kivu en particulier.   
C’est pourquoi, nous, organisations de la société civile du Nord-Kivu :
  1. Exigeons des autorités congolaises de se conformer intégralement à leurs obligations internationales et d’arrêter sans tarder Monsieur Bosco NTAGANDA et de le transférer à la CPI ;
  1. DEMANDONS INSTAMMENT :
Aux autorités de la RDC :
-          De poursuivre et d’améliorer, dans le même cadre de leurs engagements internationaux, la coopération entre la RDC et la CPI dans ses enquêtes présentes et futures sur le territoire national, et de lui apporter toute l’assistance nécessaire pour les procès en cours ;
-          D’organiser et de doter de toute urgence la justice nationale de moyens nécessaires pour poursuivre et juger tous les auteurs de crimes internationaux et d’autres crimes graves, notamment ceux de viol et de violences sexuelles récurrentes dans notre province ;
Au Bureau du Procureur de la CPI :
-          De rouvrir ses enquêtes à l’égard de Bosco NTAGANDA en vue d’inclure dans son inculpation les crimes internationaux qu’il a pu commettre au Nord-Kivu depuis 2004 jusqu’à ce jour ;
-          De tirer toutes les leçons du procès LUBANGA afin de conduire plus efficacement et plus rapidement les affaires pendantes devant la Cour d’une part ;
Aux partenaires de la RDC et à la communauté internationale :
-          D’accompagner sans complaisance les autorités congolaises dans toutes les démarches visant à mettre fin à l’impunité en général, et à celle des crimes internationaux en particulier ;
-          De soutenir les efforts et les revendications légitimes de la population congolaise et de la société civile pour davantage de justice, gage de paix, spécialement au Nord-Kivu.

Fait à Goma, le 21 mars 2012.

(Plus de 25 organisations - et non les moindres - ont signé la présente Déclaration, initiée par CIVIS CONGO - association dont je suis le Coordonnateur - et le CREDDHO).